Aligoté, libéré, délivré !
A l’origine de l’association des Aligoteurs, il était question de “sauver” le soldat Aligoté. Six ans plus tard, ce cépage vintage a le vent en poupe et il est devenu un véritable terrain de jeu et d’innovation pour les vignerons.
Ce lundi 23 mars 2023, la bâtisse imposante et toute en charpente de la Grange de Saulx (Gilly-lès-Cîteaux en Côte-de-Nuits) accueillait sous le soleil de printemps, la fine fleur de l’Aligoté pour son troisième salon professionnel en France.
Le moins monotone de tous les cépages s’est refait une garde-robe. Sous toutes ses formes, il offre des résultats très variés. Jugez par vous-même.
On démarre l’exploration par un Pet’ Nat hyper salin “Marin d’Eau” Douce imaginé par Richard Angonin, suivi d’un “Sauvage” vinifié sans fûts ni malo, frais et plein de vivacité.
Ensuite, on vire de bord chez AMI où les amertumes rejoignent nos habitudes de bières printanières, incroyable ! “Je travaille plus les aromatiques que la structure”, explique Willy Roulendes (Domaine de Montille et Comte Lafon). On termine sur une macération d’un mois (eh oui, comme pour les rouges), tendu, vif, avec une acidité jamais gommée par les tanins.
Juste en face, on retrouve Aline Beauné qui propose aussi une macération d’Aligoté 2021. Rien à voir, si ce n’est la belle amertume, mais là… de la mâche, et quelle ampleur en bouche ! “Aline a recherché l’extrait sec, commente Benjamin, son alter ego. On s’est éclatés avec cette cuvée sur des fromages, pour notre dernier repas entre amis.”
Un zig-zag de plus et hop nous voici à la Soufrandière, chez les Bret’Brothers en plein Mâconnais. “Nous, on ramasse mûr, peu importe le degré.” l’Aligoté “Aligato – cuvée Zen” cultivé sur un terroir d’appellation Saint-Véran annonce une chaleur douce, on ne regrette pas du tout le chardonnay. Nous voilà à profiter à fond de la dose de soleil de ces grappes de la Roche de Vergisson baignées “dans des fûts de 15 ans rachetés à des confrères côte-d’oriens. ” Une micro-cuvée sans soufre, en bio et biodynamie. Une bombe.
Puis, c’est un Aligoté de Marsannay proposé par le domaine Bruno Clair, cultivé en 2020 dans les Champsforêt qui prouve l’élégance, la puissance et la longueur que ce cépage aux mille vertus peut mettre dans une bouteille. Les Aligotés vieilles vignes (40 et 60 ans) des Hautes-Côtes de Nuits au domaine Cruchandeau pour lesquels on aime les bouches amples et les belles amertumes.
Au domaine Garcia, on travaille avec la technique du baie par baie, chaque grain est sélectionné, ce qui mobilise pas moins de 70 personnes pendant les vendanges pour produire environ 7000 bouteilles, du Bourgogne au Corton, sans oublier l’Aligoté !
Chez Antoine Petitprez, qui cultive 2 hectares d’Aligoté, on goûte un “Valendons” de la Zup sans soufre issu de vignes de 75 ans d’âge moyen, en sélection massales. Le 2018 est issu d’Aligoté dorés (le Graal de l’Aligoté “qui n’existe pas” selon Sylvain Pataille a-t-on entendu entre deux dégustations), d’une vivacité très belle.
Nous sommes attirés par le mot “Anost” sur l’étiquette du domaine Gautheron : Quoi, un Aligoté en Morvan ?!! En fait, pas tout à fait. “Je suis installé à Dijon mais je rêve un jour de cultiver de la vigne dans le village familial d’Anost. De l’Aligoté et du Riesling. ” Ses aligotés, notamment le Bouzeron “Les Bouchines”, sont un délice, très expressifs, de très belles amertumes.
Cap sur le domaine Jérémy Recchione pour se régaler d’un “Skin Contact” – macération d’une nuit, pressurage lent et élevage en fûts de chêne et fûts en céramique, un Aligoté sur le fruité et très ample. Bonheur.
Est-ce le sweater “Aligoté We Trust” ou le nom du domaine qui attire notre regard ? En tous cas, nous continuons vers le domaine Bersan (Saint-Bris). Pour goûter la “cuvée Marianne” 2020, un très joli hommage à la sœur du vigneron qui réunit les plus belles parcelles du domaine, élevage en fûts de 10 à 15 ans. Le domaine profite de ses (très) vieilles caves datant du Moyen-Age pour faire vieillir en bouteilles les millésimes récents.
Chez Benoît Pagot, nous écarquillons les yeux sur des IGP Sainte-Marie-La-Blanche, des Aligotés élevés en vieux fûts de Cognac et plus étonnant encore, en fûts de rhum de Cuba.
Et nous terminons notre périple chez Guilhem Goisot avec un Saint-Bris évoluant sur des terroirs kimméridgiens à grosses huîtres bleues. Élégance, équilibre, belle tension, belles amertumes, … nous laissent rêveuses…
Parfait, pour terminer notre dégustation et enchaîner avec un grand sourire (affamé) sur les huîtres proposées par Philippe Delacourcelle (Restaurant Bois Rouge). Le double chef : président des Aligoteurs et chef cuisinier de son Restaurant Bois Rouge à Flagey-Echezeaux manie comme personne le compromis entre l’exotisme et le terroir avec son Pot au Feu à la coriandre, fondant et savoureux comme lui seul sait les faire.
Découvrez (dans notre prochain article quels vignerons estampillés Anima Vinum faisaient partie des Aligoteurs actifs =>)